Extrait du « Le Livre des Imraguen, Pêcheurs du Banc d’Arguin en Mauritanie » par Marie-Laure de Noray-Dardenne, Editions Buchet et Chastel.
Arkeiss, premiers jours de mai. La pêche à la courbine bat son plein et le village vit au rythme du débarquement des lanches venues de tout le Banc d’Arguin. À l’intérieur de la maison du jeune chef, mères, filles et vieux pêcheurs échangent sur l’autre manne du village : le tourisme. Bribes de conversation:
« Le tourisme est une bonne chose pour les gens d’Arkeiss. Ce qui nous dérange est minime comparé aux avantages. Ce n’est pas seulement une question d’argent, c’est aussi une question de mouvement. Cela fait bouger le village, c’est très vivant. L’argent, on peut l’avoir autrement. Vraiment, ce n’est pas le motif principal. »
« Il faut continuer à recevoir les touristes à la façon mauritanienne mais, quand même, il faut en plus des douches et des sanitaires, une vraie cuisine. Il faut qu’on s’améliore. »
« Il nous faut un magasin en dur pour ranger le matériel, le mettre à l’abri du vent, du sable, de l’eau. Et pour protéger les touristes, au cas où…»
« Il y a deux ans, vous vous souvenez, nous avons eu un cyclone en septembre. On a dû loger les touristes chez nous, les khaïma s’étaient envolées et, avec elles, tout le matériel. On a trouvé des matelas jusqu’au Cap Tegara, plusieurs jours après ! »
« Je me souviens que les touristes étaient très inquiets pour nous, les villageois… Et nous, nous étions inquiets pour eux, et pour leurs affaires. La tempête a duré plusieurs heures. Vraiment, il nous faut un bâtiment en dur… »
« Nos touristes sont plus honnêtes qu’avant. Depuis la construction de la route Nouadhibou- Nouakchott, les malfrats, voleurs de voitures et trafiquants en tout genre ne passent plus par Arkeiss. Tant mieux, car on en a vu plusieurs qui partaient avant l’aube sans payer. »
« Et puis, on a nos visiteurs fidèles et réguliers. Surtout des résidents de Nouakchott qui viennent passer les fêtes ou les grands week-ends ici, à Arkeiss. Ils viennent avec leurs hôtes et l’on fait connaissance. »